La vie sauvage, roman (noir) d'amour

J'ai failli ne pas apprécier La vie sauvage de Thomas Gunzig aux éditions du Diable Vauvert. Il y a dans ces pages bien trop de noirceur réaliste pour moi, et je trouve que le monde réel nous fournit déjà bien suffisamment de mocheté comme ça.

Mais derrière le cynisme de l'auteur, il y a aussi du beau, des sentiments, de l'espoir et c'est très bien écrit, me donnant au final le sentiment d'un livre réussi ; il y a là un vrai roman d'amour, même si les 3/4 du livre sont bien noirs.

Seul survivant d’un accident d’avion, recueilli par des mercenaires lorsqu'il n'était qu'un bébé de 3 mois, Charles vit durant quinze ans dans la jungle d’Afrique centrale. Elevé par Cul-Nu, un homme qui ne recule devant aucune violence pour survivre mais ne se déplace jamais sans un livre, Charles a appris à lire et connaît par coeur de nombreux poèmes de Baudelaire.

Retrouvé par hasard grâce aux photos de Google le jour de ses seize ans, Charles est rapatrié (de force) en Belgique dans la maison de son oncle et sa tante. Parachuté dans ce nouveau monde, il découvre avec une horreur bien dissimulée la civilisation urbaine polluée, en même temps que sa famille sans intérêt.

Entre une tante obsédée par son corps et la consommation, un oncle maire suffisant et véreux, un cousin ado perdu dans les tréfonds d’internet et une cousine boudeuse, disgracieuse et accro aux réseaux sociaux, il ne peut se résoudre à envisager son avenir ici.

Car il a laissé en Afrique Septembre, celle qu’il aime, et rien ne peut la lui faire oublier.

Donnant le change à l'école comme à la maison, Charles s'intègre avec facilité et détachement auprès de ses camarades de classe et de l’équipe pédagogique, tout en portant en permanence un regard assez cynique sur eux.

Petit à petit, il met en place les briques de son plan échafaudé pour rejoindre Septembre, jusqu'au dénouement pour le moins inattendu.

C'est l'histoire de Tarzan revisitée à l'ère du numérique (car le monde a beaucoup changé depuis Tarzan !) mais le retour à la civilisation n'en reste pas moins difficile.

Un roman sombre, avec un regard cynique sur notre société, mais aussi poétique, drôle et humain.

Extrait : « Je suis épuisée, je n’ai pas arrêté de courir. Ma tante ne faisait donc rien de sa vie et occupait par voie de conséquences, sur l’échelle de l’évolution, une position moins importante encore que celle tenue par l’ostracode, un crustacé microscopique dont la disparition survenue au crétacé n’avait en rien changé la marche de l’évolution.»

livre reçu en service de presse